Identités Pouvoirs : l'École et les NTIC


Nous poursuivons dans ce numéro le débat ouvert par le précédent sur "L'École et les NTIC". Quelles est les causes de l'échec des politiques d'introduction de l'informatique dans les écoles menées depuis de nombreuses années et qui aujourd'hui se parent du label Internet ?

Guy Lacroix revient aux sources de l'utopie communicationnelle qui sert de fondement à l'idéologie actuelle du tout Internet. Cette utopie qui accompagne le développement de l'informatique depuis son origine, a remis au goût du jour le préfixe cyber pour valoriser n'importe quelle activité utilisant l'Internet. Le cyber fait référence à une "science", la cybernétique, dont le développement avait inspirée -des année 50 à 70- le projet d'une société d'abondance et des loisirs basée sur le développement de l'automation. La cyberutopie d'aujourd'hui si elle reprend les promesses et les illusions de la cybernétique en a oublié les critiques contre la société industrielle. Dans le domaine pédagogique, la cybernétique soutenait l'usage des machines, et elle légitimait leur emploi pour améliorer l'enseignement, par une critique acerbe de l'école. Cette dernière ne prend son sens que replacée dans la logique d'un projet social, dans lequel les progrès des sciences et des techniques jouent un rôle moteur. Ceci amène Guy Lacroix à considérer "l'échec des usages pédagogiques de l'informatique non pas comme un regrettable accident, survenu malgré les efforts méritoires de l'institution et le dévouement des enseignants mais bien comme le résultat du refus (en parti inconscient) de l'institution scolaire à se réformer".

En revanche, Jean-Luc Rinaudo soutient que la réussite ou l'échec de l'alphabétisation informatique à l'école dépend également du rapport qu'entretient chaque enseignant avec l'informatique. Comme exemple, il analyse le discours de deux enseignantes et entreprend de dévoiler ce qui dans le fonctionnement psychique de ces personnes peut faire obstacle à la démarche pédagogique. Alice et Geneviève, les deux enseignantes, se représentent toutes les deux "l'ordinateur comme un objet persécuteur", "un monstre dévorant" mais alors qu'Alice tend à repousser l'ordinateur aux limites de sa classe, Geneviève pense que son côté ludique peut aider les enfants qui ont des difficultés de concentration et accepte de réfléchir avec ses collègues sur les usages possibles à l'école primaire. La prise en compte de ces démarches individuelles peut assurer le succès d'une formation. J.V.